Travaux

Résumé des travaux annuels de la commission nationale de santé publique et de bioéthique

Les 19 premières pages expose les grands axes de travail de la CNSPB. Le Président de la Commission y montre l’importance de ces réflexions qui touchent à un pilier de la F.M., qui est d’améliorer l’Homme et l’Humanité. Il pense que le progrès scientifique ne peut pas s’arrêter et que seule l’éthique peut mettre des garde-fous.

Les 133 autres pages vont traiter de trois sujets principaux « l’avenir de l’Homme : jusqu’où peut-on aller? », « les premiers jours de la vie » et des « réflexions sur notre santé publique ».

A. L’avenir de l’Homme, jusqu’où peut-on aller ?

Le Rapporteur J.P. CHI:. en 2 pages rappelle que : «L’éthique est la morale de l’action» et se pose la question essentielle : « A quoi cela sert-il? Où est l’Homme dans tout ça?»

1.B. DUP:. Médecin généticien et spécialiste de bioéthique propose quelques pistes .:
«Tant que la connaissance progressera, il n’y a pas de raison de s’arrêter»; mais c’est le «peut-on» qui lui fait dire que cette question n’est pas d’ordre scientifique mais nécessairement morale et philosophique. Il nous faudrait une définition de l’Homme pour évaluer son éventuel progrès. Or, ce n’est pas faisable car l’Evolution mène la danse. Il l’exprime par l’image du «bâteau de Thèsèe» une relique prestigieuse que l’on conserve mais que le temps inexorablement abîme si bien que la barque n’est plus ce qu’elle était à l’origine. Ce qui importe dans l’évolution de l’humanité c’est que se développe davantage de citoyenneté : «l’éthique est ce refus de la violence primitive… Afin de retrouver les chemins de la raison de la cohabitation.». «En conclusion, dit-il, il n’y a pas de chemins tout tracés, il n’y a pas de réponse à ce qui est l’homme.». Il conclut en citant Antonio Lobo Antunes: « le courage, ce n’est pas avoir peur d’avoir peur»

2. M. GIG:., diplômé EHESS, parle «innovation et humanisme».
Il définit l’innovation comme une production de quelque chose de nouveau spécialement dans le domaine technologique qui «arrache l’humanité à ses misères…comme une force laïcisée de la providence». Il parle de l’ampleur du phénomène d’accroissement des chercheurs dans le monde, des dépôts de brevets et autres: 10 millions de chercheurs actuellement pour 5 millions il y a 15 ans et les chinois en veulent 4 millions et les indiens 3,5 rapidement. Le développement des vaccins préventifs est important. Le concept de Léonard de Vinci, l’Homme au centre est repris afin d’améliorer la condition humaine, les relations , la vie dans la cité et la relation avec la nature. Il aborde le problème que pose l’allongement de la vie : «La vie s’allonge et la vie dure toute la vie.Si on commence à jouer au vieux à 60 ans alors qu’on va aller à 97, pendant 37 ans on emmerdera le monde en disant qu’on est vieux. Ce sera ingérable..» Quelques remarques intéressantes: «la peur du vieillissement est la vraie grande peur de l’Europe…On a moins peur de la mort que de vieillir.». Il faut réintroduire le progrès dans la vie réelle. Les avancées de la connaissance et du traitement du corps humain sont inimaginables grâce aux progrès de la microchirurgie robotique , des nanotechnologies, de la robotique (ex: la mise au point des exosquelettes qui remplaceront les fauteuils roulants). En particulier quand on voit l’évolution de la médecine en Inde et le dévouement des infirmières et des docteurs, Marc Giget a une vision plutôt positive pour l’avenir surtout si l’on regarde d’autres pays.

3. P. GAU:., Directeur du CNRS donne le point de vue du CCNE Comité Consultatif National d’Ethique dont il est membre.
«Seuls ceux qui prendront le risque d’aller trop loin découvriront jusqu’où on peut aller» a dit TS ELLIOT, mais l’éthique nous demande «attention ! réfléchissons avant d’aller trop loin».Les lois de bioéthique de 1994, 2004 et 2011 n’ont pas clôturé le travail de la commission, au contraire elles l’ont stimulé. Patrick GAUDRAY n’aime pas les définitions qui restreignent leur champ que ce soit à propos de l’Homme ou de l’éthique. IL préfère la pensée suivante : «la question est le désir de la pensée» et ainsi préfère poser des questions pour approfondir les sujets.
Il rappelle que le texte fondateur de l’éthique moderne est le «Rapport BELLEMENT» publié aux USA en 1979. L’éthique ne peut pas s’appuyer sur des règles simples car elle est du domaine relatif, provisoire voire expérimental, néanmoins elle s’appuie sur des valeurs et la valeur fondamentale pour Belmont c’est «le principe d’autonomie». Il est suivi des principes de bienfaisance, de non malfaisance, de justice et de solidarité.
La CCNE donne des avis et s’auto-saisit de questions posées par des gens sans pouvoir.
La CCNE a produit 115 avis depuis 1984 portant sur l’embryon humain, sur l’alcool et les drogues, utilisation des cadavres, sur les soins palliatifs et des informations médicales.
La génétique nous dit que nous sommes très différents mais pourtant tous semblables à cause de notre ADN commune à tous les vivants.
Le génome humain est décrypté de plus en lus rapidement mais cela ne sert pas à grand chose, c’est un «défi à notre compréhension». Le profilage d’une personne ne lui sert à rien sinon parfois de l’exclure. La thérapie génique porte des espoirs mais pose des problèmes.
En conclusion il parle des difficultés de définir l’Homme normal afin de passer au post-humain et cite un sociologue québécois qui dit « En face de l’affirmation tout est possible, il y a l’évidence sensible, morale esthétique que tout ce qui compte existe déjà sauf la justice entre les hommes».

4. H. CHN:., donne son point de vue de neurobiologiste en prenant des précautions d’usage «principe de prudence» à savoir que la science est capable de supprimer une erreur (terre plate) sans pour autant dire la vérité. Pour confirmer cela il cite Alexis CARREL et SPEMANN qui passèrent chez les nazis, les lobotomies et les cures d’insuline de SAKEL.
L’essentiel de notre activité cérébrale est inconsciente : «Votre cerveau sait ce que vous pensez mais vous ne savez pas forcément ce que pense votre cerveau», complexité dans le phénomène de prise de décision et dans l’utilité de la conscience.
Grande importance de l’émotion dans notre activité cérébrale.
Notre cerveau est une machine à anticiper et crée une illusion du Monde par anticipation. Notre cerveau a une complexité incroyable puisque les 200 milliards dont 50 sont des neurones qui peuvent avoir chacune 50.000 connexions.
Le cerveau aussi a une très grande plasticité puisqu’il est toujours en complet remaniement.
Jusqu’où peut-on aller pour réguler cette complexité? L’orateur parle de deux médicaments : le méthylphénidate capable de calmer les enfants agités mais sans améliorer leurs performances et le modafinil qui soigne la maladie de l’endormissement brutal mais qui permet au soldat ou au navigateur de rester éveillé mais gare car après 48 de veille c’est la folie. Donc, en fait, on ne maitrise pas le sommeil. Il conclut avec Hannah ARENDT « Rien moins que penser ce que nous faisons»

B. Aux premiers jours de la vie

C’est la loi n°2011-814 du 7 juillet 2011 qui régit la PMA Aide Médicale à la Procréation. Ne peuvent en bénéficier que les couples mariés ou pacsés infertiles. C’est médical. La vitrification des ovocytes est autorisée. Le don des gamètes est anonyme. La gestation pour autrui est interdite.

1. V. PIZ:. fait part de ses réflexions sur le don des gamètes (cellules reproductives).
Le don des gamètes est différent des autres dons d’organe ou de tissus humains car ils transmettent une hérédité, des caractères spécifiques qui font qu’ils peuvent être soumis à un choix eugéniste.
Donner la vie,l’accueillir et la transmettre font partie d’un instinct animal profond qui se manifeste dans un «droit à l’enfant» que peut résoudre la PMA
L’anonymat est la garantie de la non-responsabilité du donneur vis-à-vis de l’enfant; de toutes façons le donneur n’est pas seul responsable puisque le laboratoire intervient.
D’autres problèmes sont soulevés : stérilité grandissante des couples des pays riches, augmentation du nombre de PMA, remise en question de l’anonymat, eugénisme…
Pour donner ses spermatozoïdes il faut être âgé de moins de 45 ans et ses ovocytes moins de 37. Les dons sont anonymes et gratuits, effectués après entretien préalable. Le prélèvement des ovocytes est particulièrement contraignant.
C’est l’Agence de la biomédecine qui a compétence en ce domaine.

2. G. PRI:., gynécologue revient sur le principe de la gratuité dans le don des ovocytes.
Ce don doit être volontaire, gratuit et anonyme.
En France le don des gamètes est faible : 1055 naissances par don de sperme et 145 par don d’ovocytes. Ainsi 80 % des dons d’ovocytes sont pratiqués à l’étranger (Espagne) pour un coût entre 5.000 et 8.000€ (900€ pour la donneuse en Espagne).
Plusieurs catégories de donneuses d’ovocytes : purement altruiste elle donne à celle qui en a besoin, la donneuse relationnelle qui dépanne un couple connu et la donneuse à elle-même. Le traitement est lourd avec 10 jours d’injection d’hormones, hospitalisation de 3 jours . On pourrait remettre en question la gratuité vu cette pénibilité et le succès observé en Espagne. On pense que 1.500€ serait attractif en France.
En conclusion il appelle à plus de réflexion car le cadre du don général d’organes pourrait devenir une entrave à ce type de dons.

3. La Commission Régionale d’Ile de France a réfléchi sur le problème des «mères porteuses». Pour l’instant la GPA Gestation Pour Autrui est interdite en France.
Le fait que d’avoir un enfant soit un choix et non plus une fatalité pose de nouveaux problèmes et en particulier celui des limites de la liberté dans la procréation. Liberté de la mère porteuse, des parents d’accueil soulevée par deux remarques : Et si la mère porteuse veut garder son enfant ? Et si les parents d’accueil n’en veulent plus ?
Est-ce que l’utérus peut-être considéré comme un don d’organe momentané ?
La position du Sénat est claire : autoriser le GPA, si la mère ne peut pas avoir d’enfant, appartenant à un couple hétérosexuel stable, qui ont au moins un enfant, domiciliée en France.
Plusieurs cas se présentent : la mère de substitution est une couveuse simplement d’un embryon provenant des parents d’accueil, ou d’un seul parent, ou d’autres donneurs.
De nombreux arguments plaident en la faveur de ce PMA : stérilité, grossesse à risques, homosexuels..
Le danger c’est la «chosification» du corps humain : production ou reproduction? Syndrome du bébé disparu, conflits entre mère,marchandisation avec possibilité d’éviter la grossesse, décontraction de la filiation, consanguinité, si enfant handicapé, identité et socialisation, officines de ventes d’enfants.
Il n’y a pas de droit à l’enfant mais le devoir de donner une famille aimante à l’enfant. Est posé aussi le statut de la stérilité. La période foetale semble riche en échanges et expérimentation ; le nourrisson vit les émotions et les péripéties de sa mère. Il semblerait qu’il est difficile de mettre en oeuvre une GPA en respectant le principe d’anonymat. L’homoparentalité doit être un débat, à part car il modifie le droit de la filiation. Ensuite sur trois pages nous avons la situation de 10 pays sur ce sujet: en résumé il n’y a que le Danemark, les Pays-Bas , le Royaume-Uni et surtout Israel qui ont légiféré pour son acceptation.
En conclusion l’orateur envisage 2 solutions : soit on légifère, ou soit on essaie de l’encadrer pour éviter les dérives. Une agence de mères porteuses serait la bienvenue.

4. Libre réflexion sur le statut de l’embryon: quand devient-il un humain? par L. FLO:.
C’est une question importante car elle touche à l’IVG, aux expériences faites sur l’embryon domaine plein de promesses.
Après avoir rappelé les principales phases du développement : fécondation, implantation (5ème jour), premiers éléments nerveux (14ème jour), mise en place des organes état de foetus (12ème semaine). A 22 semaines le foetus est viable hors de sa mère. L’IVG est autorisée jusque’à la 12ème semaine et l’IVT thérapeutique n’a pas de limite. On ne peut pas répondre scientifiquement «quand» on devient humain, on se contente de répondre «qui le définit ainsi». Les religions donnent des réponses variées : depuis la fécondation pour les catholiques et les bouddhistes, 40ème jour pour le judaïsme, 120 jours pour l’Islam. La législation française est très stricte et interdit les expériences sur les embryons sans l’autorisation des géniteurs. Mais le statut de l’embryon n’est pas pour autant défini ; il devient humain quand on décide qu’il le soit «reconnu comme tel» dirions-nous .

C. Réflexions sur notre santé publique

1. Le délabrement de la psychiatrie par A. SCH:., Ile de France. Le champ de la psychiatrie s’est transformé en ne s’adressant pas qu’aux fous mais aux stressés, veufs, veuves et traumatisés. Les restrictions budgétaires ont diminué de 125.000 lits en 30 ans et la filière des infirmières et des médecins. Il y a dérive du principe de précaution à la puissance d’un ordre sécuritaire. C’est la position éthique et citoyenne qui doit s’opposer à une politique sécuritaire où l’humain est bafoué. Enumération de 12 propositions pour améliorer cette situation dont 5 sont retenues : 70 M d’€ donné aux équipements auraient du être donnés aux personnes, écouter les patients, corriger la pénurie des soignants, éthique des métiers et remettre en place un espace d’accueil.

2. Manifeste pour une médecine de la personne par S. KIP:., psychiatre.
Ce texte est plus difficile car il se rapporte à des théories de W.R. BION puis de WOLTER et KLUWER qui démontre la grande complexité des modèles et organisation. Il promeut une médecine globale, celle tenant compte de cette complexité.

3.A propos des médicaments génériques par JP. BAL:. Professeur émérite de Pharmacie. Article très technique.
Réflexions faites pour mieux comprendre la polémique dans l’utilisation des médicaments génériques, qui sont des médicaments «de même composition qualitative et quantitatives en principes actifs» au «princeps» et qui peuvent être fabriqués par tous car le brevet est passé dans le domaine public. Leur seul mérite c’est qu’ils soient moins chers. Difficulté dans les contrôle de qualités surtout dans des pays comme la Chine et l’Inde. Notion complexe de «bioéquivalence» dépendant du type de produits et des fabrications. Les 5 recommandations de l’Académie de médecine du 14 février 2012 sont : promouvoir par une pédagogie appropriée, appliquer formellement le contrôle de qualité, rapprocher le plus possible la présentation du générique et du princeps, appliquer les règles de pharmacovigilance et définir les principes actifs indispensables.
JP BAL:. conclut que l’on doit rester très vigilants et surtout surveiller l’entrée sur le territoire des génériques provenant de certains pays.

4. Questions éthiques liées à la découverte et à l’usage de certaines cellules souches par F. LAS:.
Initialement les cellules souches proviennent des embryons surnuméraires issus de la PMA; ensuite on a pu en trouver ailleurs, par exemple dans le cordon ombilical. C’est Georges BUSH qui a interdit ces expérimentations mais OBAMA les a autorisées.
D’où la création de «banque de sang de cordon», par exemple pour les «liquidateurs» de Fukushima. Mais cela coûte cher et tenant compte de notre devise républicaine l’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris y a renoncé. Mais doit-on se priver d’un tel avantage sous prétexte que tout le monde ne peut pas en bénéficier ?
Les cellules-souches sont aussi des élixir de jouvence. Peut-on tolérer que les riches puissent vivre plus vieux?
Un autre problème c’est celui des «bébés médicaments» : trouver un embryon capable de soigner un frère ou une soeur aînés malades ? Les autorités religieuses sont contre sauf un rabin. Mais Michel ONFRAY laïc est aussi contre. Là intervient encore la temporalité : quand un embryon devient-il foetus ?.
En conclusion F. LAS:. recommande la procréation médicalement assistée PMA, le droit à la liberté de l’avortement, les banques de sang de cordon publiques et anonymes sans vouloir la fermeture des banques privées et contre le bébé-médicament.

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